L’oubli de soi ou l’effacement de soi
Pourquoi certaines personnes ont la conviction que leurs besoins émotionnels ne sont pas importants et ne seront pas satisfaits par les autres ?
Ils ont le sentiment qu’il n’y a personne qui leur prêterait suffisamment d’attention, qu’ils pourraient serrer dans leur bras et qui leur montrerait de la tendresse.
Ils ont aussi le sentiment de ne pas être entendus et compris, qu’il n’y a personne qui les écouterait vraiment, qui comprendrait leurs sentiments et partagerait leurs expériences.
Leur sentiment de ne pas être méritant, les maintient dans la conviction que personne ne va les protéger ni les aider à faire des bons choix. En même temps, ils ont tendance à protéger et aider les autres.
L’effacement de soi se manifeste par une générosité excessive accompagnée d’une répression des affects, par différentes formes d’inhibition et une dépendance au jugement des autres.
Mais pourquoi donc
Commençons par le commencement…
Quand nous venons au monde, nous n’en savons pratiquement rien et seuls nos parents et les soignants peuvent nous rassurer. En effet, les humains naissent avec un niveau du développement psychomoteur très bas et, par conséquent, sont très dépendants pour leur survie.
Il faut un an pour que l’enfant puisse marcher, deux ans pour que l’enfant apprenne à formuler des phrases simples, et des dizaines d’années pour qu’il puisse gagner sa vie. Pendant ce temps, l’enfant est entièrement dépendant des adultes, parents et soignants qui s’occuperont de lui pour subvenir à ses besoins et lui permettre de survivre.
Lorsqu’ils s’occupent d’un enfant, les parents ou autres soignants répondent à ses besoins, tant physiologiques qu’émotionnels. Mais parfois, les parents ne sont pas capables de répondre de manière adéquate aux besoins de l’enfant en raison de difficultés à rester empathiques. Ainsi, les mères indisponibles psychiquement pendant des périodes plus ou moins longues, pour cause d’un deuil, d’une dépression ou d’une autre problématique peuvent provoquer chez l’enfant un contre-investissement de soi.
De même, les séparations précoces, par exemple, les hospitalisations ou la mise en crèche trop précocement provoquent un trauma qui aboutit à un achoppement dans le développement du moi de l’enfant pouvant conduire à la constitution du faux self et à l’oubli de soi.
Du besoin à sa satisfaction
Comment un enfant peut-il signaler ses besoins ? Le principal porteur d’un tel message chez un nourrisson est le pleur. Grâce à ce média, le message atteint les parents, qui sont confrontés à plusieurs tâches : l’interprétation, la réaction affective et la satisfaction du besoin de l’enfant. Mon bébé pleure-t-il parce qu’il a faim ? Ou peut-être qu’il est mouillé et doit être changé ? Ou peut-être que c’est encore autre chose ? Que faire ? Comment répondre ?
La mère, ou un autre soignant, doit aussi nommer ce qui se passe et le mettre en sens. C’est ce que font toutes les mères bien portantes quand elles s’occupent de leurs bébés… elles leur parlent en expliquant ce qu’elles comprennent et ce qu’elles font.
Lorsque les parents n’arrivent pas à interpréter correctement le signal de l’enfant ou tardent trop à apporter la réponse, ils provoquent chez l’enfant un effacement psychique.
L’enfant se sent ignoré, il vit un sentiment d’être « effacé » par la mère, ce qui l’amène au retrait psychique, il cesse d’attendre, et finit par cesser de ressentir le besoin. Il réprime ses pulsions et ses affectes en absence du mouvement affectif, de réponse et de mise en sens par l’adulte qui s’occupe de lui. L’enfant est empêché dans sa propre existence, il inhibe ses ressentis et, pour finir, ses besoins disparaissent. Il peut même emprunter des besoins des autres en s’y identifiant et en se développant en un faux-self.