L’économie psychique du sujet est alors sous-tendue par le besoin de se débarrasser par la voie la plus courte de tout sentiment, d’angoisse, de tristesse, de désespoir. Des sentiments se trouvent alors écartés de la mentalisation, rejetés hors psyché par un « acte-symptôme », qui est une décharge dans l’agir court-circuitant l’activité psychique dans des situations anxiogènes, à chaque fois que l’équilibre narcissique du sujet est menacé. McDougall met en évidence l’effet d’épargne du travail psychique de ces « acte-symptômes » qui impliquent un échec de l’introjection ainsi qu’une carence d’élaboration psychique et un défaut de symbolisation.
Défaut de mentalisation
A partir de la découverte de cette « solution rapide », le recours à l’alcool devient compulsif et entraîne la dépendance. « L’alcoolisme apparaît comme tentative de se soigner, une autoguérison face aux douleurs mentales et aux blessures narcissiques que nul ne peut éluder » une réponse au conflit psychique et à la douleur morale. Il intervient comme protection contre l’effondrement psychique.
L’alcool comme tentative d’autoguérison
Cette fonction autothérapeutique de la dépendance en tant que réponse à des difficultés d’élaboration de la séparation avec l’objet libidinal et aux défaillances des assises narcissiques et des auto-érotismes est soulignée également par P. Jeammet. « Le sujet a trop besoin de ses objets pour pouvoir tolérer la dépendance et s’autoriser une attitude de réceptivité et des mouvements d’introjection. »
Pour sauvegarder son identité fragile, pour éviter la dépendance psychique à l’autre le sujet recourt à un objet externe, essayant d’exercer une emprise sur ce substitut objectal qui, paradoxalement, prendra l’emprise sur le sujet entraînant sa dépendance. C’est ce qui peut expliquer l’apparition de ces conduites de dépendances à l’adolescence qui est une période de réaménagements du processus de séparation-individuation.
Elles résultent d’une défaillance de ce processus et de l’impossibilité de son réaménagement lorsqu’une seconde « chance » se présente à l’adolescent. Le sujet devient dépendant lorsque ces conduites utilisant la réalité perceptivo-motrice comme contre-investissement d’une réalité interne défaillante deviennent une forme de réponse prédominante et durable.
Psychothérapie pour soigner l’alcoolisme
Dans cette perspective, la prise en charge psychothérapeutique essaiera d’aller au delà de l’obtention de l’abstinence afin d’obtenir un niveau satisfaisant de mobilisation du narcissisme pour engager le patient dans un travail d’élaboration psychique et l’aider à trouver d’autres solutions lui permettant d’échapper à la souffrance psychique et au sentiment de malaise. Il s’agit tout d’abord de restaurer, réactiver, ranimer ce qui vient à manquer.
Or, ce qui manque si souvent au sujet alcoolique c’est la confiance en soi. Aussi, (re-)construire la confiance en soi et l’estime de soi est un de principaux objectifs de la psychothérapie en alcoologie. Soigner l’alcoolisme ne peut pas se réduire à viser d’obtenir l’abstinence. Viser l’abstinence sans tenir compte de la douleur psychique qui sous-tend la conduite alcoolique comporte un risque de transformer le symptôme en son contraire.
Comment la psychothérapie s’inscrit-elle dans la prise en charge de l’alcoolisme