Le syndrome de Peter Pan ou peur de devenir adulte

La personne qui présente le syndrome de Peter Pan est généralement un homme adulte qui n’assume pas les responsabilités ni les obligations de la vie adulte. Cela peut se manifester par le fait de quitter fréquemment son emploi ou éviter les relations amoureuses durables. Il vit dans une apparente insouciance qui est due au déni des difficultés. On parle alors du refus d’être adulte.

syndrome de peter pan

Le syndrome de Peter Pan n’est pas une unité nosographique reconnu en psychopathologie. Le psychologue américain Dan Kiley a développé ce concept, en s’inspirant du personnage du livre de James Barrie « Peter Pan ou le garçon qui ne voulait pas grandir », pour désigner les adultes immatures, instables, qui ont du mal à devenir adultes. Le terme, très utilisé, décrit un phénomène de plus en plus répandu dans notre ère des hommes immatures. En effet le model culturel actuellement promu rend la condition masculine difficile à assumer.

Sur le plan psychopathologique le syndrome de Peter Pan correspond aux fonctionnement limites

L’immature affective, la course effrénée contre le temps, le vacillement identificatoire, l’instabilité, l’impulsivité, la procrastination, la difficulté à accéder aux sentiments profonds, et son corollaire le manque d’empathie ou encore la difficulté à supporter la frustration peuvent être rapprochés des fonctionnements psychiques de type borderline ou « états-limites ».

Le héros du roman de James Barrie « Peter Pan » est devenu symbole d’évasion de la réalité et de fuite devant la maturité.

Cet éternel garçon qui décide de ne jamais grandir, vit à Neverland, le Pays de Jamais, le pays qui n’existe donc pas. Il fait fi de la temporalité et s’oppose au temps qui passe pour échapper au vieillissement et à la mort. Ce personnage aux capacités extraordinaires incarne le fantasme infantile de l’immortalité, de rester indemne de toute blessure narcissique que la vie inflige.

Le préfixe « pan- », qui vient du mot grecque « tout », introduit l’idée d’une totalité, d’un ensemble complet ». Le nom de Peter Pan suggère donc qu’il peut être – de manière magique et infantile – tout ce qu’il veut. Pour arriver à la maturité nous devons pourtant sacrifier cette croyance que nous avons toutes les potentialités et en choisir celles qui sont réalistes. Cette apparente toute-puissance s’installe chez certains jeunes pour lutter contre le sentiment d’impuissance au moment où ils doivent affronter le monde exigeant des adultes.

L’histoire de Peter Pan résonne avec l’histoire de vie de l’auteur, hantée par la mort. En effet, Barrie a grandi dans l’ombre d’un frère mort à 6 ans et que l’auteur considérait comme le fils préféré de la mère.

autre peter pan

Oscar dans Le Tambour de Günter Grass

Le refus de grandir existe depuis longtemps dans la littérature. Un autre exemple en est Oscar dans Le Tambour de Günter Grass qui lui aussi décide de ne jamais grandir pour ne pas rejoindre le monde des adultes dont il méprise l’hypocrisie et la médiocrité. Oscar décide d’interrompre sa propre croissance en mettant en scène une grave chute.

 

 

Mais pourquoi cet enfant dans le corps d’un homme, repousse-t-il d’être adulte ?

Être adulte représente un défi difficile à relever. Devenir adulte angoisse le jeune qui manque gravement de confiance en soi, il entend donc rester un enfant pour toujours.

Est-ce réellement un choix ?

Accepter de ne plus être enfant, c’est accepter le temps qui passe. Faire le deuil de son enfance est la tâche qui attend tout adolescent. En grandissant nous devons accepter des pertes des désillusions. Grandir c’est vieillir, et vieillir c’est mourir un jour. Certains, pour arrêter le temps font le choix de s’accrocher à l’idéal infantile. Pour eux grandir c’est faire ce que l’on veut, en accord avec les promesses « tu feras ce que tu veux quand tu seras grand ».  Renoncement est toutefois nécessaire pour accéder à la maturité.

Afin de mûrir, les représentations infantiles de Soi et du monde doivent se transformer, sans quoi l’adolescent reste bloqué.

Grandir apporte aussi son lot de déceptions dont l’acceptation est une castration symbolique nécessaire pour garder un équilibre face à la réalité. De plus, à l’adolescence, l’équilibre narcissique est mis à rude épreuve. L’adolescent fait l’expérience de son incomplétude et se trouve fragilisé narcissiquement par la confrontation avec le défi de maturité.

Le héros de Barrie ne veut pas devenir adulte. En réalité, dans le syndrome il ne s’agit pas tant d’un refus conscient mais plutôt d’une difficulté à affronter le monde adulte.

Syndrome de Peter Pan – une fuite devant les responsabilités et les engagements.

Les sujets présentant ce syndrome peuvent par exemple refuser un emploi ou des tâches de vie quotidienne. De surcroit, ils s’attendent à ce que tout le monde autour d’eux soutienne leur mode de vie.

Ils sont immatures émotionnellement et ont des difficultés à supporter la frustration. Face à l’adversité ils peuvent avoir des réactions d’enfant, ne pas contrôler leurs émotions, s’offusquer ou devenir furieux. Rapidement frustrés et débordés émotionnellement face à des situations difficiles ils n’arrivent pas à les gérer. Ils ont des difficultés à organiser leur emploi du temps.

Vivant dans l’illusion de liberté absolue, Peter Pan évite l’implication au travail et multiplie les relations sans engagement. En effet, nouer des liens est compliqué pour lui. Il est déchiré entre des sentiments contradictoires d’être heureux avec un partenaire et se sentir contraint et frustré par les besoins de l’autre.

Fragile narcissiquement, il ne parvient pas à faire face aux critiques et va blâmer les autres.

Passionné du plaisir, Peter Pan affiche le bonheur apparent et tente de cacher à soi-même comme aux autres les fissures qui lézardent son équilibre psychique. Il semble mener une vie insouciante sans remarquer les obligations et les contraintes et les difficultés de la vie.

Il vit dans l’illusion de paradis perdu de l’enfance liée à la difficulté d’élaborer et d’accepter la perte des idéaux de l’enfance.

L’instabilité émotionnelle le mène vers la fuite dans la drogue qui aide à maintenir le déni de la réalité mais conduit parfois à des drames.

En quête d’identité, il peut rester accroché à l’image d’une idole et multiplier des projets grandioses sans jamais les réaliser.

 

Le vernis d’apparence se fissure avec le temps pour dévoiler une réalité plus sombre : des angoisses, une tristesse et un vide intérieur.

 

Son immaturité n’est pas sans conséquences pour lui-même 

Sur le plan relationnel, il n’arrive pas à rester engagé dans une relation amoureuse ou amicale qui dure.

Le travail est pour nous tous un défi et peut nous stresser. Une personne atteinte du syndrome de Peter Pan peut sembler ne pas motivée pour trouver un emploi. En effet, son immaturité, sa difficulté à faire face aux responsabilités, à supporter la frustration l’empêcheront à oser de chercher un emploi dont il a peur.

Une fois en poste, même s’il est brillant, il sera vite ennuyé ou frustré et cherchera à se recycler dans un notre domaine. Quand il reste accroché aux idéaux de l’enfance, il peut se fixer des objectifs irréalistes comme devenir un athlète professionnel ou une star de cinéma. Il aura alors du mal à envisager des options de carrière plus réalistes. Cependant, même s’il est talentueux, il ne sera pas suffisamment motivé pour réaliser ses rêves qui resteront une excuse pour ne pas faire le travail nécessaire pour lancer une carrière plus réaliste.

Son entourage souffre aussi 

Autant il est facile de succomber à son charme, autant vivre au quotidien et partager des responsabilités avec un homme qui présente des traits de Peter Pan peut s’avérer très difficile. D’autant plus qu’il peut manifester un déficit grave d’empathie et qu’il reste principalement intéressé par la satisfaction de ses propres besoins.

Face à lui, il est nécessaire de poser des limites dès le départ d’une relation et formuler clairement ses besoins, ne pas accepter des comportements irresponsables mais aussi complimenter des mesures positives prises.

Les difficultés à faire face aux responsabilités peut l’amener à accumuler des problèmes financiers, relationnels, familiaux, etc. Suite à une série de ruptures tel que divorce ou licenciements, il se retrouve parfois dans une phase dépressive dont il aura du mal à sortir.

 

Peut-on traiter le syndrome de Peter Pan ?

Ce fonctionnement immature n’est aucunement un choix conscient d’un homme. La thérapie commence par la recherche des causes profondes et majoritairement inconscientes de l’immaturité et du refus d’engagement. La psychothérapie cherche à comprendre la personne qui souffre et à l’aider à se comprendre elle-même. La thérapie se concentre sur la compréhension des expériences passées, des relations précoces et leur influence sur le fonctionnement actuel.

Le psychothérapeute détermine les modalités de prise en charge en fonction de ces éléments.  Le travail psychothérapique se résume en l’accompagner dans le processus du renoncement nécessaire, et en l’exploration du potentiel à faire face aux réalités de la vie adulte.

Plus l’intervention est précoce, dès les premières difficultés à l’adolescence et plus le changement recherché est possible. Avec l’attention bienveillante le thérapeute aide le patient à élaborer les pertes imposées par l’adolescence et lâcher la toute-puissance.

Plusieurs dispositifs psychothérapeutiques peuvent être proposés, individuels comme groupaux, permettant à des personnes en souffrance d’élaborer la ou les problématiques qui les bloquent dans le processus de maturation. Inclure la famille dans la thérapie apporte aussi des résultats positifs en permettant de passer de l’illusion mégalomaniaque à la création des liens plus authentiques.

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