Trouble de personnalité borderline

Comment soigner ? Peut-on en guérir ?

Borderline ou fonctionnement limite

 

Les personnes que nous appelons borderline ou « état limite » sont à la fois très attachantes et violentes. Elles peuvent facilement tomber dans l’excès de dynamisme et d’euphorie ou au contraire de désespoir en manifestent de la rage face aux frustrations les plus banales. Elles peuvent donc être déroutantes car imprévisibles et chaotiques.

Appellation actuelle d’état limite pourrait suggérer qu’il s’agit d’un état transitoire. Cependant ce concept renvoie plutôt à un fonctionnement stable et durable dans son instabilité et dans sa variabilité. Un sujet dont le fonctionnement psychique est considéré comme limite, se situe dans une zone intermédiaire entre la névrose et la psychose. Dans cette zone intermédiaire dominent les troubles narcissiques.

D’autre part, le concept de limite évoque la frontière entre le normal et le pathologique. Le fonctionnement limite se trouve en effet à la lisière entre la névrose et la psychose. Il a pourtant des caractéristiques bien propres.

Parmi elles se trouvent une hypersensibilité à un grand nombre de choses, avec une grande intensité des sentiments, des sensations très intenses et une instabilité émotionnelle. Elles sont liées au manque de sentiment de sécurité intérieure et aux angoisses massives, si particulières de ses formations psychiques. Les sujets borderline ressentent une angoisse diffuse mais aussi   l’angoisse d’intrusion extrême ainsi que l’angoisse d’abandon en lien avec la dépendance à l’objet (l’autre).

 

Le fonctionnement borderline

Le fonctionnement borderline, qualifié par certains de trouble de personnalité borderline, se caractérise par une alternance entre des périodes de calme et des périodes d’instabilité et d’agressivité. Cette volatilité émotionnelle et l’hyperémotivité peuvent être très difficile à supporter pour l’entourage.

Leur impulsivité, leur intolérance à la frustration, leur difficulté à contrôler la colère peuvent causer des explosions de colère et l’agressivité envers soi-même ou les autres. Cette instabilité rende les relations difficiles et provoquent rejets et ruptures.

Représentation de soi instable, doublée d’un sentiment d’infériorité lié à l’image de soi dégradée, engendre d’autres difficultés dans les relations interpersonnelles. En effet, un lien affectif durable est souvent le fruit de la dépendance affective mais la rupture n’est jamais loin.

En effet, le lien à l’autre est menaçant car vécu comme non fiable. Alors que les mécanismes de défense archaïques n’empêchent pas l’émergence de l’angoisse tout en étant très coûteux.

Identité floue Borderline fonctionnements limites

Premières manifestations du développement de la personnalité borderline

Les premières manifestations peuvent apparaitre dès l’enfance : l’enfant ressent un désarroi, parfois même une sidération. Ces états sont souvent accompagnés d’une agitation et de somatisations : nausées, vomissements, coliques chez l’enfant peuvent témoigner d’un malaise intérieur. L’enfant ne peut pas gérer lui-même ce mal-être car son moi n’est pas encore suffisamment développé. Si l’entourage est défaillant, l’enfant ressent alors une angoisse traumatisante qui laissera des stigmates.

Les périodes dépressives se traduisent par un ennui, un sentiment du vide et une inhibition d’action. La dépendance envers l’adulte pousse l’enfant dans un conformisme dévitalisant. En effet, incapable à se faire reconnaitre, l’enfant s’éteint et se replie sur soi. Mais insatisfait,  il peut passer par des phases associant une agressivité et des attitudes de demande revendicative voir de provocation.

 

Les manifestations chez l’adulte borderline

La porosité du Moi et celles des frontières de son identité expose le sujet limite à la menace d’intrusion. Il construit alors des murs défensifs qui lui permettent de ne pas se sentir envahi mais qui l’éloignent de l’autre.

Il présente donc une hypersensibilité à la possibilité du rejet et de l’abandon, liée à la dépendance anaclitique qui induit une instabilité dans les relations.

Une difficulté à contenir les affects, des changements fréquents de l’humeur, une instabilité émotionnelles,

Une instabilité de l’image de soi,

Des comportement autodestructeurs, avec des tentatives de suicide et parfois une addiction aux  tentatives de suicide, notamment comme tentatives de gérer la solitude,

Une impulsivité et une difficulté à gérer les émotions,

Un sentiment chronique de vide et d’ennui,

Une peur de ne pas être aimé,

Un vécu dépressif chronique.

Quelle est problématique majeure du borderline ?

La problématique majeure du borderline se rattache à la distance optimale impossible à maintenir entre sujet et objet (l’objet c’est l’autre). Cette problématique est liée aux angoisses d’intrusion et de séparation qui poussent au désespoir. Ils reste dans une relation anaclitique de dépendance à l’autre, nécessitant un étayage constant  ce qui est insupportable pour la personne borderline elle même mais également pour le partenaire.

La précarité du fonctionnement du préconscient provoque un défaut d’élaboration des angoisses dépressives et de séparation. En conséquence, les borderline subissent des fluctuations émotionnelles fréquentes, des brusques variations entre l’idéalisation et la dévalorisation. Ils sont aux prises avec un sentiment d’ennui et du vide, les relations ou les actions leur paraissent vidés de sens. Les angoisses d’abandon et d’intrusion ressenties suscitent de l’irritation voire des colères violentes. Elles sont aussi à l’origine de difficultés relationnelles.

Pour lutter contre leurs angoisses, les personnes borderline ont recours aux mécanismes de défense rigides tels que projection, déni, clivage. Elles peuvent pousser l’autre à bout. Elles risquent aussi d’user de la manipulation agressive pour contrôler l’autre.

D’autre part, des comportements compulsifs, addictifs, des impulsions, ou encore des conduites à risque servent à soulager temporairement les tensions intolérables. Les sujets borderline se trouvent donc souvent impliqués dans des troubles de conduite alimentaire (TCA). Ils s’enferment dans le cercle vicieux de conduites auto-agressifs pouvant aller jusqu’aux tentatives de suicide à répétition.

une tête qui explose représente l'angoisse chez un borderline D’où vient cette souffrance ?

Beaucoup de patients limites ont été confrontés à des traumatismes ou à des carences durables dans les soins précoces. Un décès, une séparation d’avec une personne qui procure les soins à l’enfant ou des abus sur l’enfant peuvent donc fragiliser le moi de l’enfant et provoquer les angoisses terrifiantes.

Parmi les circonstances favorisantes, on trouve aussi les séparations des parents, le fait d’être mis en nourrice ou en pension.

Un défaut de soins ou un manque d’étayage affectif de parents peut également être responsable de bien de difficultés de patients limites. Alors qu’une frustration excessive des besoins pulsionnels de l’enfant est la cause du manque de différenciation entre soi et l’autre.

Lorsque les soignants (la famille et en particulier la mère) d’un enfant ne sont pas suffisamment rassurants, soit qu’ils laissent l’enfant seul dans le désarroi, soit qu’ils le couvent trop, parfois les deux alternativement, l’enfant peut développer les troubles limites.

La parabole du porc-épic

La métaphore du porc-épic pour illustrer chez ces sujets le mode de relation de type anaclitique coexistant avec l’ « angoisse du rapproché » ainsi que la fragilité identificatoire.

Les sujets au fonctionnement limite peuvent apparaitre agréables et avenants, ils peuvent même rechercher intensément le contact. Mais, compte tenu de leur humeur instable, les relations peuvent s’avérer très difficiles et les ruptures sont fréquentes.

Schopenhauer a utilisé cette métaphore pour illustrer sa théorie des relations sociales. Elle semble très adaptée pour représenter les difficultés relationnelles typiques de  sujets borderline, les difficultés à maintenir le lien.

L’hiver, les porc-épics dans leur grotte froide sont attirés les uns vers les autres pour se réchauffer. Mais dès qu’ils se serrent les uns contre les autres leurs piquants les blessent. Ou bien ils restent éloignés les uns des autres dans la solitude glacée et ils souffrent du froid. Ou bien ils souffrent des blessures de la proximité.

L’hémorragie psychique du borderline

Elle utilisa ce mot, délimiter. […]  elle voulait savoir que je comprenne bien ce que c’était, la dissolution des limites, et à quel point cela la terrifiait. Elle expliqua que le contour des objets et des personnes était fragile et pouvait se briser comme un fil de coton. Elle murmura que, pour elle, cela avait toujours été ainsi : toute chose pouvait perdre ses limites et dégouliner sur une autre, les matières les plus hétérogènes fondaient, le tout se mélangeait et fusionnait. Elle s’exclama qu’elle avait toujours dû se faire violence pour se persuader  que la vie avait des limites robustes, parce qu’elle savait depuis l’enfance que ce n’était pas comme ça – ce n’était pas du tout comme ça -, et elle n’arrivait pas à croire que ces limites pouvaient résister aux chocs et aux poussées.

[…] elle ne pouvait pas se permettre un moment de distraction : si elle se déconcentrait, les choses véritables, avec leurs contorsions violentes et douloureuses, la terrorisaient et prenaient le dessus sur les choses inventées qui, grâce à leur solidité physique et mentales, la calmaient : alors elle s’enfonçait dans une réalité confuse et poisseuse, et ne parvenait plus à donner aucun contour clair à ses sensations – une sensation tactile devenait visuelle, une sensation visuelle devenait olfactive. […] Ainsi, si elle n’était pas vigilante et ne prêtait pas attention aux limites, tout se délitait et devenait caillots de sang menstruel, polypes cancéreux ou fibres jaunâtres. »

Elena Ferrante ‘L’enfant perdue’, fragment

Borderline ou fonctionnement limite

A l’instar de porc-épics en hiver, le sujet borderline, animé par l’angoisse anaclitique se sent poussés vers les autres. Mais le rapproché provoque vite le sentiment d’étouffement qui rend la relation insupportable. Il va donc s’éloigner de nouveau, tantôt pour y revenir tantôt c’est une rupture de lien définitive.

 

Liens relationnels difficiles

Le trouble borderline a parfois été considéré comme une version féminine de la personnalité antisociale.

Ce fonctionnement psychique se caractérise par une propension à l’extériorisation du conflit psychique intérieur. L’émotion liée n’est pas conscientisée ou mal identifiée et par conséquent elle s’exprime par l’agir.

Cela s’accompagne par

– une impulsivité énorme,

– une confusion de l’identité,

– une relation à l’autre marquée par l’idéalisation radicale alternant avec une dévalorisation tout aussi radicale, l’accès à l’ambivalence est en effet barré,

– la propension des personnes borderline à présumer qu’elles seront abandonnées et à agir d’une manière qui rend cet abandon pratiquement certain. Une personne borderline appréhende l’abandon jusqu’à le provoquer.

 

Psychothérapie pour le trouble de personnalité borderline

Un personne borderline peut guérir. Elle gardera une certaine sensibilité ou une émotivité mais l’intensité émotionnelle qui était la sienne devient nettement moins importante.  Elle pourra donc gérer ses émotions et notamment ses angoisses plus facilement.

La psychothérapie est le soin de choix pour les fonctionnements limites. Certains médicaments peuvent aider à passer des crises et des moments difficiles mais le traitement de base qui permet un changement durable est le traitement psychothérapeutique.

La psychothérapie du lien

Différentes figures des états limites

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