La sidération traumatique

La sidération traumatique, cet état de vide psychique absolu, se produit sous l’effet d’un violent choc émotionnel. Elle est le plus souvent liée à un évènement traumatique terrifiant, l’équivalent de la confrontation à la mort.

La sidération en est la première conséquence psychique directe. Cette paralysie de la vie psychique ne dure parfois qu’un instant mais la discontinuité dans l’intégration de la conscience, de la perception de la mémoire, des émotions et du contrôle moteur peut avoir des suites longues et graves.

SIDERATION traumatique, SIDERATION psychique

Qu’est-ce que la sidération ?

Historiquement, la sidération signifiait l’influence funeste exercée par un astre sur le comportement ou la santé d’une personne.

Puis, la médecine a emprunté ce terme pour nommer la suspension brusque des fonctions vitales.

En psychologie, le terme signifie une mise à l’arrêt soudain, la pétrification du psychisme face à l’horreur du trauma.

Cet arrêt n’est pas volontaire, mais provoqué automatiquement et le sujet n’a pas de prise sur ce qui se passe. C’est un niveau d’hormones de stress dépassant un certain seuil qui l’active même si le sujet n’a pas la capacité de comprendre intellectuellement ce qui lui arrive.

Un stress violent représente un risque vital, notamment cardio-vasculaire et neurologiques pour l’organisme par « surchauffe », ou surproduction des hormones de stress. Pour préserver la survie, le cerveau saturé fait disjoncter le circuit émotionnel et (comme un fusible qui saute) le bloque en créant un état d’anesthésies. La personne ne peut alors ni ressentir ni raisonner et n’enregistre plus ce qu’elle vit. Elle n’aura donc aucun souvenir conscient.

Dans la sidération traumatique, la personne ressent une peur de mourir d’angoisse si intense qu’elle provoque la mise hors circuit des processus physiologiques et psychiques comme perception, capacité de ressentir, de réfléchir, avec l’arrêt des réactions psychomotrices.

Ce court-circuit est provoqué par un trop plein d’hormones de stress qui font tout disjoncter.

En conséquence de cet arrêt, la personne ne ressent rien, elle reste déconnectée, dans un état d’anesthésie physique et psychique. Les perceptions traumatiques sont aussi limitées, la personne ne peut donc pas discerner sa situation et en conséquence ne peut pas réagir. Elle ne peut donc pas se défendre et, en plus, elle ne gardera pas de traces sensées dans le psychisme.

Quand la sidération nous pétrifie

Face à d’effroi ressenti à l’occasion d’un violent traumatisme qui menace l’intégrité physique et psychique, le psychisme se bloque, reste paralysé, et ne peut plus penser ce qui lui arrive. Ne pouvant pas identifier ce qui est en train de se passer, la victime ne peut pas mettre en place une réaction appropriée. Elle est figée, tétanisée et en conséquence ne peut pas se défendre. Elle s’immobilise et donc ne peut pas fuir, ni crier ni bouger. La sidération bloque l’organisme dans toutes ses composantes : perceptive, motrice, cognitive et affective.

 

Formes mineures de la sidération du psychisme

 

La sidération peut se manifester également dans des situations moins traumatiques et peut se produire dans la vie quotidienne.

Par exemple, la sidération du psychisme, une forme d’anéantissement du fonctionnement subjectif, peut se manifester après un deuil inattendu et brutal, par exemple suite au suicide d’un enfant.

Ou encore, un enfant qui assiste à une scène sexuelle, qui n’a pas encore la capacité de comprendre ce qui se passe, va subir une perte de sens et un vivre sentiment d’humiliation et de culpabilité qui vont le sidérer, le geler affectivement et cognitivement.

 

Micro-sidérations

Par ailleurs, Freud a remarqué qu’un jeu de mots dépourvu de sens peut nous sidérer. Face à un mot d’esprit, le sujet reste scotché car subitement coupé de ses repères, et pendant un instant il ne peut se représenter le réel. Ainsi, un langage paradoxal qui, en abusant le sens des mots les vide du sens, provoque la sidération des processus de pensées.

Même s’il s’agit là d’une micro-sidération, lorsque cet état est répété, il peut aussi amener à une rupture des liens associatifs, à un blocage durable des processus cognitifs et un débordement émotionnel.

Ainsi, face à quelqu’un qui tient des propos paradoxales ou blessant, dégradants, nous pouvons nous retrouver temporairement incapables de penser et encore moins de répondre ou se défendre. Les pervers et les harceleurs ont tendance à utiliser un discours incohérent ou paradoxal afin de déstabiliser leur victime pour obtenir la soumission ou garder l’emprise. La sidération peut donc aussi être une des conséquences du harcèlement et des messages paradoxaux qui sidèrent la pensée.

La sidération peut être provoquée par les médias et surtout par la télévision qui déverse quotidiennement des images dont l’objectif est de choquer pour attirer les spectateurs. Ces images suscitent l’émotion qui saisit, stupéfait, et sidère à minima. Mais répétée à l’infini pendant des années, ces micro-déconnections annihilent notre capacité de penser.

La dissociation comme conséquence de la sidération traumatique - psychologue parisLa dissociation comme conséquence de la sidération traumatique

Lorsque le trauma est intense, irreprésentable et indicible, la sidération qu’il provoque peut entrainer une dissociation plus durable. En fait, pour éviter l’angoisse insurmontable, le psychisme pétrifié se divise alors en plusieurs parties et peut rester ainsi clivé durablement. La personne parait hors temps, indifférente alors que le trauma perdure derrière ces défenses érigées contre la douleur psychique.

La dissociation durable du psychisme se manifestant notamment par une rupture des liens associatifs, une perte des repères, une confusion psychique ainsi qu’une rupture du sentiment d’identité. La dissociation, quand elle est une conséquence de la sidération, entraine un sentiment d’impuissance, une apathie et peut aboutir à un état de dévitalisation et de dépression.

 

Les conséquences de la sidération

Les conséquences de la sidération peuvent durer longtemps. C’est le cas de l’amnésie des événements traumatiques et d’autres coupures dans le chemin des émotions et dans la mentalisation. Elles nécessitent une thérapie pour restaurer aussi bien les représentations mentales que les associations entre elles et les connections avec les émotions.

Une éprouvé de terreur vécu peut se manifester pendant longtemps sous forme d’attaques de panique, des réminiscences, ou des plaintes somatiques. A la longue cela peut mener à un effondrement dépressif et aux affections psychosomatiques. Ces dernières sont une conséquence de la pensée interrompue qui empêche la mentalisation.

Certaines personnes tentent de gérer cette souffrance par des produits psychotropes ce qui conduit aux addictions.

En cas de violences sexuelles par exemple, et en plus forte raison chez l’enfant pour qui c’est absolument incompréhensible et terrorisant, l’effraction psychique est telle que la sidération bloque durablement tout ou une partie de l’appareil psychique. L’enfant ne pourra donc pas se développer de manière harmonieuse et notamment dans le champ de la mentalisation.

Lorsque la sidération se produit lors d’une agression, d’un viol par exemple, la victime peut ressentir un fort sentiment de culpabilité de ne s’être pas défendue, alors que en réalité elle n’y pouvait rien car n’était pas en mesure de réagir. S’en suit une perte d’estime de soi, une dégradation de l’image corporelle et une souffrance morale qui peut provoquer des comportements d’automutilation, des addictions ou encore des conduites à risque.

Dans ces situations, la psychothérapie permet de déculpabiliser et de prendre de la distance qui instaure la pensée.

Un sentiment d’insécurité, un évitement phobique, des angoisses et la dépression apparaissent donc souvent en conséquence des traumatismes mais ne sont pas forcément liée à la sidération qui elle-même est déjà une première conséquence du trauma.

La psychothérapie pour reprendre la vie psychique

La sidération coupe la personne de son vécu et fait qu’elle fonctionne comme un automate. En conséquence, des souvenirs traumatiques restent inaccessibles, piégés dans l’inconscient. La sidération empêche de constituer une mémoire de l’événement, tout en laissant une empreinte inconsciente et donc inaccessible et difficile à élaborer.

De plus, puisque la personne en état de sidération reste pétrifiée et ne peut agir, les conséquences du trauma peuvent être majorée. Premièrement parce que la personne ne s’en défend pas et deuxièmement pars qu’ensuite elle se sent coupable de ne pas avoir réagi. Par exemple, une femme qui n’a pas pu se défendre ni même crier au secours lors du viol en ressent une extrême culpabilité alors même qu’elle n’a pas été en mesure de se défendre à cause de cette sidération traumatique qui a fait disjoncter son psychisme.

La psychothérapie vise alors à donner la possibilité de penser l’évènement traumatique, de donner du sens à ce que l’on vient de vivre. A la sortie de la sidération le sujet se trouve avec des trous dans la mémoire qui correspondent aux traces mnésiques qui restent coincées dans l’inconscient. La psychothérapie cherche à reconstituer la mémoire de l’événement, elle aide le patient à se remémorer afin de reconstruire une continuité psychique et la capacité de symbolisation. La psychanalyse ou une psychothérapie profonde, psychodynamique ou intégrative profonde, favorise l’émergence de défenses archaïques, puis de souvenirs refoulés ou déniés et permet leur élaboration.

L’EMDR ou l’hypnose peuvent également être utiles pour débloquer les souvenirs traumatiques, activer les processus psychiques bloqués, pour réapprendre à sentir et d’exprimer les émotions bloquées.

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