La pyrophobie ou la phobie du feu

La pyrophobie ou la phobie du feu qu’est-ce que c’est ?

La phobie est une peur plus ou moins intense et irrationnelle déclenchée par une circonstance qui elle-même ne présente pas de danger. La peur phobique n’est pas rationnelle car est liée à une angoisse d’origine interne qui par déplacement est projetée sur un objet ou une situation extérieure. Elle se fixe sur un objet extérieur, comme l’avion, l’araignée ou le feu. Cet objet extérieur ne sert que de support de projection d’une angoisse qui vient de notre psychisme.

Dans le cas de la pyrophobie le sujet craint le feu. Le feu constitue le support de projection d’une figure angoissante de l’univers psychique interne.

Ce mécanisme inconscient est universellement utilisé pour gérer l’angoisse. C’est pourquoi les phobies sont particulièrement fréquentes dans l’enfance lorsque les moyens de contenir l’angoisse sont encore très limités.

La phobie suscite des conduites d’évitement dont la persistance peut devenir très handicapante pour le sujet.

pyrophobie ou la phobie du feu illustrée par La traversée des feux du purgatoire illustration d'un manuscrit de la divine comédie de Dante

La traversée des feux du purgatoire illustration d’un manuscrit de la divine comédie de Dante

Comment se manifeste la pyrophobie ou la phobie du feu?

La pyrophobie ou la phobie du feu est une phobie spécifique qui peut être plus ou moins intense. Avant tout le feu peut nous faire peur à juste raison ; les incendies sont en effet souvent graves et peuvent être mortelles. Il est donc légitime d’être prudent et de s’en protéger en faisant attention, en installant les détecteurs de fumée ou les extincteurs etc… Cette crainte du feu est donc naturelle et même nécessaire pour nous protéger.

Mais les personnes qui souffrent de pyrophobie  éprouvent des sentiments désagréables, plus ou moins intenses, lorsqu’elles se trouvent face au feu, et parfois même à l’idée du feu. Lorsqu’elle a une faible intensité, la pyrophobie reste une simple gêne. Mais chez certains il peut s’agir de crises de panique incontrôlables. Dans les cas extrêmes, elles peuvent perturber considérablement la vie quotidienne ou le travail.

Elle se manifeste aussi par une appréhension anticipatoire et l’évitement de toutes situations provoquant la peur du feu. Certains s’effrayent rien qu’à l’idée qu’un incendie puisse se déclarer. En conséquence, au quotidien cette phobie peut s’avérer très handicapante.

En effet, s’il reste rationnel de ressentir la peur lorsque l’on se trouve dans une maison en flammes, ressentir autant d’angoisse devant la flamme d’une bougie ou d’un briquet est excessif.

Imaginer le danger

Parfois une simple évocation du feu provoque une monté d’angoisse chez le phobique.

Il s’agit donc alors d’une phobie qui peut affecter le fonctionnement psychique. En effet la peur ressentie amène les phobiques à éviter de manipuler le feu. Ils appréhendent également de se trouver en présence du feu sous toutes ses formes : cuisinière, feux d’artifice, briquet, allumettes…

Cette peur n’est bien entendu pas rationnelle : c’est bien l’angoisse interne du sujet qui se fixe à des situations qui ont trait au feu.

Les personnes qui ont une peur excessive du feu sont tout à fait conscientes du caractère irrationnel de leur crainte. Cependant elles ne peuvent pas contrôler l’angoisse. En conséquence de quoi, la phobie va entraîner des répercussions dans la vie personnelle, sociale et professionnelle de l’individu. Le sujet atteint de pyrophobie peut en effet se sentir étourdi ou avoir mal au cœur chaque fois qu’il s’approche de la cuisinière à gaz. L’odeur de fumée ou une odeur de brûlé peut également déclencher une crise d’angoisse. Cette angoisse amène souvent aux rituels obsessionnels-compulsifs de vérifications. Le sujet vérifie par exemple plusieurs fois avant de sortir si le poêle est éteint, revenir à la maison pour vérifier si le fer à repasser a bien été débranché.

Dans certains cas, la peur phobique du feu est très proche de la phobie d’impulsion. Cette dernière est marquée de désirs contradictoires et de sentiments ambivalents. L’angoisse de passage à l’acte (provoquer un incendie) y côtoie une excitation à l’idée d’incendie. Dans cet ensemble ambivalent se mêlent de pensées agressives en lien avec les frustrations, la haine, ou encore la culpabilité qui ne peut pas être exprimée. A l’inverse chez des pyromanes cette pulsion va les pousser à allumer le feu destructeur.

Les causes de la pyrophobie

Les phobies restent rarement isolées et limitées. Bien au contraire, elles s’inscrivent dans un ensemble de troubles anxio-dépressifs.

La phobie est une forme d’anxiété. Autant que telle elle est associée à d’autres manifestations de cette dernière. De plus, les phobies apparaissent souvent dans les formes d’anxiété associées aux dépressions.

La conception psychanalytique classique voit dans la phobie le substitut d’une satisfaction pulsionnelle empêchée dans la réalité. En effet, l’angoisse interne qui sous-tend la création du symptôme vient du surmoi réprimant la pulsionnalité. Les phobies, les idées compulsives et les comportements obsédants, isolés de leur origine affective, constituent un compromis entre ces tendances opposées. Lorsque les pensées et les affects agressifs ne peuvent plus être contenus, elles provoquent une monté d’angoisse. Ils peuvent alors expulsés sous la forme d’idées violentes ou d’images compulsives.

Une pulsion refoulée peut donc s’exprimer par une phobie, par une phobie d’impulsion mais aussi par la pyromanie.

Quid de trauma ?

D’autre part, une expérience traumatique vécu en lien avec le feu, par exemple un incendie peut contribuer à la formation du symptôme phobique.

De plus, nous avons tous été conditionnés dès la plus tendre enfance à avoir peur de feu. Nos parents nous ont souvent fait peur en pensant ainsi nous protéger du danger. Ils ont exagéré la peur pour être sûrs que les enfants ne jouent pas avec le feu. Ce conditionnement peut avoir un impact sur la formation du symptôme pyrophobique. Il se peut que le surcroit de l’anxiété du sujet conditionné pour avoir peur du feu se fixe justement là-dessus.

Pour comprendre l’origine de la phobie chez chaque individu il faut tenir compte des aspects subjectifs dans la formation du symptôme. En effet, une image peut en cacher une autre, selon les associations inconscientes du sujet. La formation du symptôme passe par le mécanisme du déplacement : une représentation vient à la place d’une autre pour cacher les conflits ou les désirs interdits. Et le feu représente justement la passion : le feu visible symbolise le feu invisible de la pulsion ardente, le feu libidinal des désirs en conflit avec le surmoi. L’enfer est également représenté classiquement par le feu, les flemmes peuvent donc renvoyer au sentiment de culpabilité liée au conflit surmoïque.

Les symptômes

Les différents symptômes sont sensiblement les mêmes que dans l’ensemble de phobies. Les symptômes apparaissent habituellement au niveau psychologique et somatique et peuvent inclure :

Le sentiment de peur intense face au feu ou même à l’évocation du feu, pouvant aller jusqu’à la panique avec l’incapacité de contrôler les émotions, même si le sujet sait qu’elles sont irrationnelles et injustifiées.

L’évitement des situations qui ont trait au feu et qui pourraient être à l’origine d’un incendie (la cuisinière à gaz)

La difficulté ou l’évitement à accomplir certaines tâches, par exemple de cuisiner.

Ceci s’accompagne de symptômes physiques typiques de l’anxiété qui peuvent inclure : augmentation du rythme cardiaque, essoufflement, tension musculaire notamment au niveau de la poitrine qui donne une sensation d’oppression, sudation, tremblements, sensation de la bouche sèche, besoin d’aller aux toilettes.

Il peut y avoir des nausées et des étourdissements voir des évanouissements, des maux de tête ou des crampes d’estomac aussi à l’odeur de la fumée.

Tous ses symptômes peuvent limiter sérieusement les activités de la personne qui souffre de pyrophobie.

Jan Cossiers Prométhée apportant le feu, illustre pyrophobie ou phobie du feu

Jan Cossiers Prométhée apportant le feu, Museo Nacional del Prado.   Prométhée, après avoir dérobé le feu sacré de l’Olympe pour en faire don aux humains, est condamné par Zeus à être attaché à un rocher sur le mont Caucase, son foie dévoré par l’Aigle

Comment soigner la pyrophobie ? 

La pyrophobie ou la phobie du feu peut devenir donc un véritable handicap : le pyrophobique ne peut pas regarder le feu ou même penser au feu sans être paralysé par la panique.

Le traitement de la pyrophobie dépendra de son intensité mais surtout du contexte psychopathologique dans lequel la phobie s’inscrit. En effet, le symptôme phobique peut apparaitre dans différents contextes nosographiques : dans certains états psychotiques débutants (schizophrénie), dans certaines névroses, ou encore dans les états-limites.

La psychothérapie psychodynamique essaye de remonter à l’origine de la phobie, à ses causes profondes pour permettre un changement plus durable du fonctionnement psychique dans lequel s’inscrit la phobie. Le patient a conscience du caractère irrationnel et excessif de sa peur et du caractère inadéquat de ses comportements. Il peut avoir l’intuition que la peur du feu découle d’une peur archaïque. Ce type de prise en charge permet la résurgence de l’infantile, et grâce à l’expression des idées obsédantes et des émotions ambivalentes permet d’élaborer l’ambivalence.

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