Aspect transnosographique des addictions
Les addictions apparaissent dans chacune des organisations psychopathologiques : névrose, psychose, perversion, fonctionnement limite. Quelque soit le fonctionnement psychique sous-jacent, les addictés souffrent. Leur souffrance est tue, difficile à verbaliser et même à identifier et souvent transformée en manque du produit. Dans la clinique des addictions nous rencontrons différents types d’angoisses qui conduisent à l’addiction : les angoisses névrotiques (l’angoisse de perdre l’amour), l’angoisse d’abandon, l’angoisse narcissique, angoisses dépressives, de perte objectal, angoisses persécutives mais également les angoisses psychotiques. L’organisation de toutes les organisations psychiques est marquée par un progressif appauvrissement des investissements. Le fonctionnement psychique s’organise autour de l’addiction ce qui abrase les différences structurelles entre les individus.
Addictions et névroses
Dans le contexte des addictions la névrotisation reste précaire. La prégnance de l’extériorisation des conflits, des atteintes narcissiques et des mouvements dépressifs empêche la constitution d’une névrose. Les sujets addictés névrosés fonctionnent entre une organisation névrotique et une inorganisation archaïque dans laquelle la répétition stérile empêche la résolution des conflits. Face à ce défaut d’élaboration du corps pulsionnel, les dysfonctionnements internes sont colmaté par le produit afin d’éviter les irruptions de l’affect, d’émotions, de sentiments.
Addictions et psychoses
Un grand nombre d’addictions concerne les personnes présentant un trouble psychotique. Dans le contexte psychotique, les comportements addictifs interviennent comme une technique de survie permettant de contenir les angoisses indicibles et d’éviter la dissociation ou autre décompensation psychotique. Pour Monjauze, toute addiction relève au moins en partie des zones psychotiques de la personnalité, sans exclure que des développements psychiques plus adaptatifs se soient construits en parallèle. La fissure psychique que l’addict cherche à combler vient ici de tout premiers temps du développement psychique.
Addictions et aménagements pervers
Aux confins de la psychose, les addictions s’inscrivent dans des aménagements pervers et des conduites psychopathiques qui constituent le dernier rempart avant l’effondrement psychotique. L’instrumentalisation de l’objet, le recours au déni et au clivage, la pulsion partielle s’y retrouvent fréquemment. La relation objectale est réduite à un lien d’emprise qui atténue la tension entre la crainte de dépendance et le besoin d’autonomie.
Addictions et fonctionnements limites
La difficulté de représentation et d’élaboration des conflits sur la scène psychique qui provoque la rupture de l’enveloppe psychique et la nécessité de passer par un objet extérieur, place les addictions dans le champ des fonctionnements limites dont l’addiction est considérée être le paradigme. Les limites entre le Moi et l’objet sont flou. Les relations sont marquées par l’anaclitisme qui interdit la résolution du conflit d’ambivalence avec l’objet. La problématique addictive, comme celle des fonctionnements limites, est infiltrée de la vulnérabilité narcissique et du risque du développement de la dépression qui en découle. Les décompensations dépressives dominent la majorité des tableaux cliniques. Les compulsions addictives qui apportent des sensations sensorielles servent à lutter contre la menace dépressive et son gel psychique. Nous sommes frappés par l’attirance pour le suicide chez nos patients, suivie ou pas de passage à l’acte, ce qui nous renvoie au concept controversé de la pulsion de mort.